Les pêcheurs du Pérou le connaissent très bien, ce retour régulier (tous les 3 à 7 années) d’un réchauffement important des eaux équatoriales de l’est de l’Océan Pacifique autour de la Noël – d’où le nom El Niño (le bébé qui naît le 25 décembre). Dans une année normale, le retour d’une eau plus chaude en provenance du Pacifique équatorial de l’ouest signifie la fin de la saison de la pêche. Mais lors d’un phénomène El Niño important, cette fin arrive plus tôt et le revenu des pêcheurs le ressent fortement. Il y a aussi l’arrivée d’eaux froides en provenance de l’Antarctique – qu’on a surnommé La Niña. Cette eau froide est riche en minéraux et donc en plancton et donc en poissons mangeurs de plancton. Ces deux phénomènes, El Niño et La Niña, sont appelés ENSO du terme anglais El Niño Southern Oscillation. La cause en est un affaiblissement des alizées autour de l’équateur.
Les oscillations des températures du phénomène ENSO peuvent être tellement fortes qu’elles influencent directement le temps partout sur terre. Un épisode El Niño donne de très fortes pluies, avec des éboulements et des courants de boue sur la côte ouest d’Amérique du Sud et parfois aussi des inondations en Californie. El Niño peut être la cause d’importantes inondations en Afrique de l’Est. Il provoque par contre des sécheresses dans des parties importantes de l’Asie du sud et du sud-est, en retardant les pluies des moussons en Inde, Indonésie, Malaisie et aussi l’Australie. L’épisode actuel d’El Niño fut prédit au début de l’année et on en voit déjà clairement des conséquences. La température des eaux de surfaces enregistrée le 18 novembre dépassait de 3,1°C la température normale et le maximum d’El Niño ne sera atteint qu’en février 2016. Avant le phénomène actuel, le plus grand El Niño jamais mesuré était celui de 1997-98 qui avait causé 97 milliards de $ dégâts et plus de 20.000 morts ! (1) En 1998 il y a eu aussi une La Niña avec les conséquences inverses d’un El Niño : l’ouragan Mitch aux États-Unis, l’inondation de la moitié des terres du Bangladesh et l’évacuation de 200 millions de personnes en China à cause d’inondations.
En mai 2015, les états du Texas en en partie de l’Oklahoma ont connu des pluies intenses avec de très graves inondations (14 morts) après 5 années de sécheresse. Pendant ce même mois de mai, il y a eu un ouragan avec de lourds dégâts au nord du Mexique (13 morts). Cette année, El Niño peut être rendu responsable des 2000 morts de la canicule en Inde, canicule à cause du retard de la mousson, et aussi des feux de forêts intenses en Indonésie et en Malaisie qu’on n’arrivait pas à éteindre à cause de l’absence des pluies de la mousson.
Le phénomène de l’ENSO existe depuis 10.000 ans et semble donc stable. Mais aujourd’hui on fait des recherches sur les conséquences possibles du réchauffement climatique sur l’ENSO. Les épisodes de La Niña seront probablement plus fréquents et intenses comme on a pu le voir en 2010-2011 lors de très grandes inondations en Australie. Les pluies y furent tellement fortes que le niveau de la mer avait diminué localement de 7 mm.
Une autre conséquence des périodes d’ENSO c’est à chaque fois le blanchiment des coraux : les algues symbiotiques qui vivent dans les polypes du corail, quittent leur hôte et le corail se meurt. En 1988 on a estimé que la mort avait frappé 16% des coraux. Leur possibilité de reprise dépendra du réchauffement des océans et de son degré d’acidité. Acidification et le réchauffement sont une menace directe pour la survie des coraux. Et cela diminuera directement la biodiversité car les coraux sont les endroits privilégiés pour la reproduction de très nombreuses espèces de poissons.
C’est en écoutant ces derniers jours tout ce blabla de la COP 21 que je voulais vous indiquer une des réalités actuelles du changement climatique. La COP 21 n’est qu’un mensonge grotesque et il sera responsable d’un crime contre l’humanité et contre la nature dont nous sommes dépendant.e.s.