Le 16 avril 2017 aura lieu le référendum sur la réforme constitutionnelle proposée par le parti du président Recep Tayyip Erdogan, l’AKP. Cette révision constitutionnelle vise à élargir considérablement les pouvoirs du président, lui permettant notamment de nommer et révoquer les ministres, d’intervenir dans le fonctionnement de la justice, de promulguer des décrets et de déclarer l’état d’urgence.
La victoire du oui au référendum donnerait aussi la possibilité à Erdogan de rester au pouvoir jusqu’en 2029. Pour rappel, il a été premier ministre de Turquie entre 2003 et 2014 avant de se faire élire président la même année.
Fuite en avant autoritaire
Dans le même temps, le gouvernement de l’AKP continue sa fuite en avant autoritaire et répressive contre les populations kurdes, démocrates, progressistes, et la société civile dans son ensemble. Cette évolution s’est accélérée depuis la tentative manquée de coup d’Etat du 15 juillet 2016 menée par une fraction de l’armée alliée au mouvement réactionnaire Gulleniste. Les manifestations du caractère antidémocratique du régime turc sont multiples: emprisonnement de plusieurs parlementaires, fermeture de très nombreux titres de presse et répression contre les journalistes critiques, mise sous tutelle administrative de localités du Kurdistan, exclusion de plus de 100 000 personnes de la fonction publique depuis mi-juillet, en particulier des syndicalistes et des universitaires signataires d’une pétition pour la paix. A cela, il faut ajouter la mort d’environ 2000 personnes et la destruction de quartiers entiers dans le sud-est de la Turquie, dont la population est majoritairement kurde, dans les derniers 18 mois à la suite d’opérations de sécurité du gouvernement. 500 000 personnes ont dû quitter leurs foyers à cause des destructions massives et de graves violations des droits de l’homme de la part des forces armées du gouvernement turc.
Pérenniser la répression
Dans ce cadre, le projet de nouvelle constitution a pour objectif de renforcer et de pérenniser cette répression autour d’une hyper-présidentialisation des institutions. Le président Erdogan affirme dans ses meetings que celles et ceux qui soutiennent le non veulent diviser le pays, portent atteinte au drapeau de la nation et sont des terroristes, comme le PKK. «Les organisations terroristes font en chœur campagne pour le non», a enfoncé le Premier ministre turc Binali Yildirim.
Face à cette situation, le camp du non est très fortement divisé au plan politique, rassemblant des républicains, des forces islamiques, kurdes, l’extrême gauche, l’extrême droite, diverses associations (professionnelles, écologistes…), des syndicats, etc. Chacune des composantes du non mène dès lors sa propre campagne avec une argumentation différente. Selon le camarade Uraz Aydin, membre de la section turque de la IVe Internationale et qui a souffert de la répression du gouvernement turc, «les pourcentages d’intentions de vote semblent assez proches, même si chaque institut de sondage privilégie le oui ou le non selon sa position politique. Toutefois la possibilité d’une victoire du non est cette fois-ci bien réelle, principalement en raison de la crise de l’extrême droite».
Dans cette perspective, la lutte pour le non est une bataille décisive pour l’avenir de la Turquie. Une victoire du non ne mettrait pas complètement un terme aux politiques autoritaires et antisociales des autorités turques. Elle ouvrirait néanmoins une brèche dans l’édifice du gouvernement de l’AKP et du sultan Erdogan et redonnerait de l’espoir à toutes les composantes de la société qui se battent pour un avenir meilleur.
Source : solidaritéS