Le racisme n’est pas une opinion mais un délit!
Les baromètres de la diversité et l’Eurobaromètre nous en informe régulièrement tout en nous épinglant comme étant parmi les plus racistes d’Europe: les Belges considèrent que les discriminations envers les étrangers et les croyants sont fort répandus dans notre pays. Un tiers des personnes interrogées se déclarent intolérantes envers les minorités ethniques. Parmi celles-là, 10% pensent que certaines «races» sont plus douées que d’autres. 20% ne souhaite pas avoir de collègues (d’origine) étrangère. 50% sont contre un lieu de prière sur le lieu de travail. 66% détestent qu’ils parlent leur langue entre eux. Entre 60 à 70% des Belges ont peu ou pas de contact avec ces groupes ethniques… et pourtant 63% n’a jamais eu d’expérience négative avec des étrangers.
Du côté des personnes issues de l’immigration, plus de 50% se dit avoir été victime de discriminations lors d’une recherche d’un logement, le chiffre monte à 75% lors de la recherche d’un emploi. Ce racisme provoque une surreprésentation des migrants (et de leurs enfants) dans les régimes spéciaux (travail intérimaire, occasionnel ou saisonnier), dans les boulots où les conditions de travail et la rémunération sont les plus mauvaises; ils sont sous-représentés dans les contrats à durée indéterminé. Tandis que le taux d’activités est de 69% chez les belges, il est de 40% chez les marocains et turcs et de 33% chez les congolais. Dans certains quartiers à Bruxelles, plus de 50% des jeunes et/ou des femmes issus de l’immigration sont au chômage. 28% des agences d’intérim ont réagi positivement aux demandes de discriminations d’un « client mystère ». Il est ainsi facile de comprendre que 54% des personnes d’origine marocaine vivent sous le seuil de pauvreté; cela vaut également pour 33% des turcs et 36% des européens de l’Est. Un enfant d’origine étrangère sur trois vit sous le seuil de pauvreté.
Malgré ces constatations, 13 ans après la Conférence mondiale de Durban contre le racisme de 2001, la Belgique ne s’est toujours pas dotée d’un plan d’action contre toutes les formes de racismes (islamophobie, antisémitisme, négrophobie, anti-Roms), elle n’a toujours pas entamé le processus de ratification de la Convention des Nations Unies, datant de 1990, sur la protection des droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille, ni le protocole N°12 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme, mais a également royalement mis de côté les recommandations issues de la Commission du Dialogue interculturel (2004) et des Assises de l’interculturalité (2010).
Malgré l’obligation de l’article 52 de la loi du 10 mai 2007 qui prévoyait une évaluation tous les cinq ans par le Parlement des trois lois contre les discriminations (genre, antiracisme et anti-discrimination), une telle évaluation n’a toujours pas été réalisée. La Belgique manque cruellement d’une culture de l’évaluation de ses politiques publiques. Malgré l’insuffisance (il ne s’intéresse qu’à deux générations de migrants)et/ou le manque de précision des données statistiques en Belgique, le monitoring socio-économique du Centre pour l’Egalité des Chances et de Lutte Contre le Racisme observe la maintenance de formes tenaces de discrimination directe et indirecte sur base de la nationalité, de l’origine et de la religion dans le secteur de l’emploi, de l’enseignement, du logement, des services et des biens et dans les services publics. Il faudrait non seulement adopter, tant au niveau fédéral que régional ou communautaire des textes réglementaires (Arrêté royal et Arrêtés des gouvernements) déterminant les hypothèses et les conditions dans lesquelles des mesures d’action positive et des tests de situation judiciaire ou médiatique (citoyens actifs) peuvent être mises en œuvre en faveur des personnes issues de l’immigration. Mais il faudrait surtout passer des politiques incantatoires de chartes de la diversité et d’incitations inefficaces à une action plus volontariste avec un objectif quantifiable et répressif (plus de moyens pour les contrôles, des amendes fiscales et enlever des permis d’exercer pour les agences immobilières ou d’intérim par ex.) lorsque cela s’avère indispensable. 90% des migrants refusent de porter plainte contre les discriminations parce qu’ils n’ont pas confiance dans les institutions policière et judiciaire; ils constatent l’impunité et le faible taux de condamnation.
Si tout le monde s’accorde pour dire que le service public doit être neutre, il faudrait faire le choix d’une neutralité inclusive, ce qui permettrait d’autoriser tous les signes convictionnels pour autant que le service rendu au public soit neutre et de qualité dans les actes. Entre 60 et 75% des discriminations islamophobes concernent des femmes musulmanes. Nous rappelons que dans les entreprises privés et dans l’enseignement supérieur (écoles supérieures, universités, promotion sociale,…) l’interdiction du port de signes convictionnels n’est pas admissible et que dans l’enseignement obligatoire la question doit être tranchée par le législatif en faveur des jeunes filles souhaitant garder leur foulard (l’école doit rester un outil d’émancipation sociale pour tous ces jeunes).
A l’encontre des résultats de la recherche scientifique dont il ressort que l’acquisition de la nationalité belge en soi contribue bel et bien à augmenter les possibilités d’emploi des migrants, nous souhaitons revenir à un assouplissement du Code de la nationalité. Demander la nationalité belge doit être un droit et non un privilège pour ceux qui habitent en Belgique depuis plus de trois ans. La nouvelle loi, telle quelle, mènera à l’exclusion sociale. Les premières victimes seront les personnes à bas revenus, les femmes, les peu ou pas scolarisés, les intérimaires, les sans-emploi. Alors que ce sont eux qui en ont le plus besoin!
Après une longue lutte des milieux associatifs et syndicaux, suite au Traité de Maastricht de 1992, les ressortissants de l’Union européenne ont le droit de vote et d’éligibilité aux élections communales et européennes sans autre condition de durée de résidence que les Belges. Les ressortissants d’autres États ont le droit de vote après 5 ans de résidence légale, mais pas d’éligibilité, et aux élections communales uniquement. Ces derniers doivent en outre signer un document par lequel ils s’engagent à respecter la constitution et les lois belges, et la Convention européenne des droits de l’homme. Nous demandons l’égalité des droits entre tous les résidents : il faut élargir le droit de vote et d’éligibilité de tous à tout les niveaux de pouvoir : régional, communautaire, fédéral et européenne.
Lutter contre le racisme c’est non seulement un accueil policier plus empathique dans les commissariats (meilleur accueil des plaintes, caméra contre les violences policières verbales et physiques), un traitement judiciaire plus rapide et ferme envers ces auteurs (plus de condamnations médiatisées), une application de la correctionnalisation des délits de presse discriminatoires (qu’il faudrait élargir aux discours de haine sur internet et les forums de discussion) car il faut lutter contre l’impunité relative de ces délits. Le racisme n’est pas une opinion mais un délit ! Il faudrait donc également ratifier le protocole additionnel à la Convention sur la cybercriminalité relatif à l’incrimination d’actes de nature raciste et xénophobe.
Cette action répressive doit être accompagnée dans le monde scolaire par l’intégration obligatoire de cours traitant de l’histoire des migrations, du colonialisme, de l’esclavagisme, de philosophie et d’anthropologie comparée des religions ; et dans le monde du travail par une formation à la démarche interculturelle et à la lutte contre les stéréotypes, préjugés et discriminations pour tous les professionnels de tous les secteurs professionnels : police, justice, enseignement, hôpitaux, administrations et entreprises publiques, travailleurs sociaux, etc…
Afin de rendre hommage à toutes ces vagues de l’immigration qui ont construit notre pays par leur sueur et leur santé, nous avons besoin d’un musé de l’immigration. Le projet doit à la fois être un espace muséal (de conservation et de présentation au public des collections représentant l’histoire et les cultures de l’immigration) et un espace pédagogique et social, permettant aux jeunes de mieux appréhender l’histoire d’un pays qui est «terre d’immigration» depuis de nombreuses décennies.
Beaucoup de migrants qui s’installent chez nous ont déjà une formation scolaire et/ou une expérience professionnelle, il faudrait donc que la législation en matière de reconnaissance des diplômes soit assouplie afin de permettre à certains de postuler à d’autres fonctions et dans d’autres secteurs qui répondent mieux à leurs compétences. Un accompagnement avec des formations spécifiques, complémentaires pourrait également être envisagé pour valoriser leurs compétences.
N’oublions pas que les gens de voyage (en majorité des Belges) réclament depuis des années des lieux aménagé d’hivernage et de passage.
Enfin, en ce qui concerne les parcours d’accueil et d’intégration citoyenne, ils ne devront pas être discriminatoires (en abolissant les critères de délimitation du public bénéficiaire, d’obtention d’un titre de séjour, de durée du séjour, d’origine nationale et d’âge qui excluent un grand nombre de migrants), ni obligatoire, ni aboutir à des amendes ou à la suppression d’aide sociale comme en Flandre. Le budget prévu n’est pas adapté aux objectifs fixés. Le contenu du parcours d’accueil ne comporte aucune dimension de vivre-ensemble (interculturalité) et d’éducation permanente (interactivité), ni une place aux associations de migrants.
Pour la liberté de circulation et d’installation
A la veille des élections, nous revendiquons un changement radical en ce qui concerne la politique d’immigration, tant belge qu’européenne. Si cette dernière conditionne l’autre, nous constatons néanmoins que la politique menée par Maggie De Block et le gouvernement actuel réduit presque à néant l’accès au droit de séjour en Belgique. Ce qui fait que la Belgique devient championne de l’Europe forteresse en matière d’éloignements forcés, ou «volontaires»: sous pression, 11.386 personnes ont été éloignées en 2012, soit une augmentation constante depuis 2009 (dernière opération de régularisation): 3.847 rapatriements et reprises DUBLIN, 1.895 refoulements, 5.644 retours volontaires, 6.797 personnes ont séjourné en centre fermé. Quel gâchis humain et financier!
Notre Etat expulse sans état d’âme des personnes vers les pays d’origine qu’elles ont fui à cause des persécution en tout genre, des dictatures, des guerres, de la misère, etc… Des réalités récurrentes auxquelles s’ajoutent aujourd’hui les catastrophes climatiques… Peu importe pour notre gouvernement, qu’elles y trouvent la mort à leur arrivée, comme le jeune Aref, expulsé il y a quelques mois, victime des Talibans en Afghanistan!
Les hommes et femmes, depuis toujours, ont marché, ont circulé pour chercher la sécurité et une vie décente pour eux-mêmes et leurs familles. Comme chacun peut le constater, pourtant, la plupart des migrants se réfugient près de leur pays d’origine: les Syriens sont plus de deux millions en Turquie, en Jordanie, Liban, Irak, Egypte. Un peu plus de 2.000 ont demandé l’asile en Belgique… Nous demandons que l’Etat belge prenne aujourd’hui sa part d’une politique d’accueil. Rappelons que les Belges ont émigré outremer, comme beaucoup d’autres Européens, pour fuir la misère au 19e siècle, qu’ils ont trouvé accueil, fuyant la Belgique occupée en 1940, en France et en Angleterre.
Aujourd’hui, seuls environ 25% des demandeurs d’asile obtiennent un statut de réfugié ou la protection subsidiaire (protection en cas de guerre dans le pays d’origine). Le taux de régularisation pour raison humanitaire ou médicale ne fait que chuter: 6% de réponses positives pour toutes les demandes traitées en 2013! Des personnes qui ont bénéficié de formations en Belgique, qui travaillent, sont expulsées. Des personnes gravement malades, par exemple séropositives, sont renvoyées dans des pays où elles n’auront pas accès aux soins nécessaires. Des conjoints ne peuvent se rejoindre, des enfants sont séparés de leurs parents… des familles sont expulsées, alors que les enfants, scolarisés ici, ne connaissent bien qu’une de nos langues nationales…
Les centres fermés sont des prisons qui cachent leur nom; ils exercent une violence quotidienne à l’égard des personnes qui y sont détenues. En effet, la détention a pour but de casser la résistance à l’expulsion. La violence peut être physique, dès que la porte du centre a été franchie et toute forme de révolte entraîne la mise au cachot. Cette violence atteint son paroxysme au moment de l’expulsion, lorsque la personne est emmenée à l’avion: menottes, corps sanglé, entravé, coups, insultes… Des plaintes ont été déposées suite à des blessures. Cette violence est aussi psychologique: menace d’expulsion sans savoir quand elle aura lieu, privation de liberté sans en connaitre le terme, …
Nous demandons la suppression des centres fermés pour étrangers et l’arrêt immédiat des expulsions. Les demandeurs d’asile doivent être considérés comme des personnes vulnérables et ne devraient pas faire l’objet d’une mesure privative de liberté. Nous demandons une politique d’asile et d’immigration qui respecte les Droits humains.
A cause de cette politique restrictive, de nombreuses personnes se retrouvent dans la clandestinité, ce qui signifie la précarité, et la surexploitation dans des filières de travail en noir, dans la construction, l’Horeca, le nettoyage, les services domestiques et aux personnes… Seule une régularisation de tous les sans-papiers permettrait de mettre fin à cette situation qui divise les travailleurs avec et sans papiers.
L’opération de régularisation de 2009 a été ponctuelle et partielle. D’un côté, elle a permis à une partie des personnes présentes depuis longtemps sur le territoire d’obtenir un séjour; d’un autre côté, elle a laissé beaucoup de monde sur le carreau. Par exemple elle prévoyait de prendre en compte le critère « travail » (possibilité de contrat de travail), mais peu de dossiers ont été acceptés; des pièces d’identité manquantes ont aussi bloqué beaucoup d’autres dossiers…
Aujourd’hui, plus aucun critère n’existe, les instructions de 2009 ont été mises à la poubelle et la quasi totalité des dossiers de régularisation est refusée. Pendant de longues années, les mouvements de sans papiers ont revendiqué une commission permanente de régularisation indépendante de l’Office des Etrangers, avec des critères clairs. Cette revendication est plus que jamais d’actualité.
Depuis les années quatre-vingt, les politiques européennes d’immigration n’ont cessé de durcir les conditions d’entrée et de séjour des personnes migrantes. Sous prétexte de lutter contre les réseaux de passeur-euse-s, les États européens imposent leur politique de maîtrise des flux migratoires, non seulement en fermant les frontières mais également en repoussant les migrant-e-s aux portes de l’Europe. Après plus de trente ans de réformes successives de la loi du 15 décembre 1980 sur la l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers, la Belgique doit se doter d’un « code du droit des étrangers » pour rendre sa législation compréhensible, la réparer, la compléter et assurer son articulation avec d’autres normes qui lui sont liées. Il faut revenir à ce que les familles aient le droit de vivre dignement en famille, le regroupement familial est un droit qui ne doit pas être lié à un montant de revenus exorbitant. Les doubles-nationaux doivent obtenir la protection diplomatique de notre pays. L’inspection des lois sociale doit combattre les employeurs qui engagent leurs travailleurs au noir et pas ces derniers.
Les migrant-e-s sont les otages des pouvoirs publics, et monnaie d’échange dans le cadre des accords de gestion «concertée» des flux migratoires, régulièrement assortis de contreparties d’ordre économique (trompeusement appelée «aide au développement»), administratif (visas) et/ou concessions commerciales pour s’assurer de la coopération des pays tiers en matière de contrôle de l’immigration. En Belgique, la transposition de la Directive «de la honte» est un prétexte tout trouvé pour légitimer le durcissement du droit des étranger-e-s. Les dispositions les plus strictes envisagées comme des exceptions dans la législation européenne sont généralisées et systématisées en droit interne.
Enfin, la militarisation des frontières avec Frontex notamment est un indice supplémentaire du climat particulièrement délétère à l’égard des personnes migrantes. La révision du mandat de l’Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l’Union européenne (FRONTEX), du 25 octobre 2011, maintient pour l’essentiel l’opacité et la culture du secret qui entourent les opérations de l’agence.
Au-delà de la question de savoir si les agents des équipes de FRONTEX respectent eux-mêmes les droits fondamentaux, les objectifs des opérations conjointes de surveillance des frontières organisées et coordonnées par FRONTEX posent, en tant que tels, problème car ils violent, en soi, les droits fondamentaux des migrants. Ainsi, en violation flagrante du droit de quitter tout pays, y compris le sien, FRONTEX participe à des opérations qui entrainent des retours dans les pays de provenance et se félicite de bloquer de nombreux boat people qui tentent de passer la frontière. Autre exemple, le non-respect du principe de non-refoulement quand,à la frontière entre la Grèce et la Turquie, des migrants sont refoulés vers la Turquie sans que leur demande de protection internationale n’ait été examinée, cela au vu et au su des agents de FRONTEX. Le principe de non-discrimination est violé également dans les opérations qui, dans les aéroports, ciblent directement les migrants en fonction de leur nationalité ou de leur provenance. Pour toutes ces raisons, nous souhaitons la suppression de FRONTEX, en attendant nous demandons à la Belgique de cesser de collaborer à ces opérations coûteuses.