Le Delhaize Chazal est parmi les dizaines de magasins en grève
Tout comme des dizaines d’autres magasins, le Delhaize Chazal à Schaerbeek est en grève depuis l’annonce faite le 12 juin à 8 heures de la restructuration qui vise la fermeture de 14 magasins, le licenciement collectif de 2500 travailleurs, une diminution des salaires et une régression des conditions de travail.
J’y ai passé une partie de la journée de jeudi 12 et de vendredi 13 juin, en solidarité. Une majorité du personnel était – et est toujours – en grève et occupe le parking. Les grévistes y discutent des enjeux de la restructuration, l’avenir de leur emploi et l’utilité de la grève.
Dans cet article, je fais un compte-rendu de la visite d’un manager de Delhaize Bruxelles, avec les questions posées par les travailleurs et les réponses données par ce gestionnaire.
Quand le manager arrive, il impose immédiatement ses conditions: “Nous allons faire une réunion à l’intérieur avec tous les travailleurs qui veulent participer”. Pas question! La réunion se fera dehors. Une première victoire qui montre que le rapport de force est du côté des travailleurs en grève. Ensuite, les travailleurs posent des questions et le manager prétend répondre. Il répète à plusieurs reprises qu’il est quand-même sympa de venir discuter. Nous présentons ici quelques questions marquantes avec des réponses frappantes, avec mon commentaire.
Delhaize fait 190 millions de bénéfices
Une travailleuse pose une question sur les bénéfices de Delhaize: l’entreprise fait des centaines de millions de bénéfices, pourriez-vous expliquer pourquoi il faut alors faire des coupes sur le dos des petits travailleurs?
La réponse parle surtout de Colruyt et de… Albert Heijn! Cette dernière entreprise serait en train de s’implémenter en Belgique et pratique des prix beaucoup plus bas que Delhaize. La restructuration est donc une mesure clairvoyante qui s’adapte déjà à une future implantation de ce nouveau magasin…
Albert Heijn va donc conquérir la Belgique? Ça sent fort le foutage de gueule! Delhaize fait bel et bien des bénéfices. Une réponse plus honnête serait selon moi: « Delhaize fait des bénéfices mais veut en faire encore plus pour satisfaire les actionnaires. Et ce sont les travailleurs qui en payeront le prix. »
Le choix de l’été n’est pas innocent
Une autre travailleuse pose la question: « Pourquoi passez-vous à l’action en été, au moment où une bonne partie des travailleuses syndiquées seront en vacances? Pourquoi ne voulez-vous pas attendre jusqu’en septembre? Le manager: « Ce n’est jamais le bon moment. Si c’est en période de fêtes de fin d’année vous ne serez pas contentes non plus. » Commentaire: comme la question le dit très clairement, la direction choisit une période de l’année où la résistance est affaiblie. Et elle se moque des travailleurs en mentionnant la période du nouvel an. Le patronat et les travailleurs savent très bien ce qu’est la force d’une grève en grande surface en décembre!
La procédure Renault pour une entreprise qui fait des bénéfices?
Encore une autre travailleuse demande: « Vous dites que ce ne sont pour l’instant que des “intentions” et que vous allez suivre la procédure Renault mais Delhaize n’est pas en faillite! Le manager: « La procédure Renault est la voie légale à suivre ». Commentaire: donc tapis rouge de l’État belge pour les entreprises pour faire des licenciements collectifs?
Les autres questions posées par les grévistes n’ont pas abouti non plus à des réponses satisfaisantes. Delhaize semble résolu de mener une attaque frontale contre les droits des travailleuses et des travailleurs. Mais la direction n’a pas encore gagné. Cette grève de plusieurs jours dans des dizaines de magasins montre que les travailleuses et les travailleurs ne se laisseront pas faire et lutteront contre cette casse sociale profondément injuste.
La solidarité est importante. Soyons avec le personnel de Delhaize en lutte. Diffusez les informations, mais surtout: allez voir sur place, sur un parking occupé ou à un piquet de grève.
image: Little Shiva