Six ans après le début de la crise, la croissance mondiale (autour de 3 % cette année) n’a pas retrouvé son niveau d’avant-crise (4,5 % entre 2000 et 2007)…
La zone euro est plongée dans une longue dépression, le Japon a basculé à nouveau dans la récession, et les pays « émergents » ralentissent. Les États-Unis et le Royaume-Uni ont renoué avec la croissance (autour de 2,5 %), mais celle-ci est fragile et tirée par une bulle financière qui menace d’exploser et d’entraîner dans sa chute l’économie mondiale. D’ores et déjà, l’investissement des entreprises a reculé de 0,7 % au 3e trimestre au Royaume-Uni, et le repli des profits aux États-Unis est de mauvaise augure pour l’investissement et la croissance des prochains mois.
La baisse du prix du pétrole
Les prix du pétrole ont chuté de 45 % en six mois, en raison du ralentissement de la croissance mondiale (côté demande) et de l’abondance de la production (côté offre). L’Arabie Saoudite et les émirats du Golfe, qui peuvent supporter des prix bas, ont refusé de fermer les vannes pour des raisons économiques et politiques. Leur objectif est d’éliminer des concurrents (l’industrie américaine du pétrole de schiste n’est plus rentable au prix actuel) et d’affaiblir la Russie et l’Iran, pays alliés de la Syrie d’Assad. La chute des prix du pétrole a certes un effet globalement positif sur la croissance mondiale, mais elle fait plonger certains pays producteurs.
La Russie, également frappée par les sanctions occidentales, bascule en récession. Les fuites de capitaux s’amplifient, le rouble s’effondre malgré l’augmentation des taux d’intérêts, l’inflation grimpe à 10 %. Néanmoins, son important excédent commercial dans les années 2000 lui a permis d’accumuler des « réserves de change » qui lui permettent encore d’amortir la baisse de sa monnaie en vendant des dollars pour racheter du rouble. Au Venezuela, les revenus de l’or noir représentent 95 % des exportations et les deux tiers des recettes de l’État. Le gouvernement de Maduro s’apprête à annoncer des mesures d’austérité drastiques pour faire face à la nouvelle donne pétrolière qui pourrait se prolonger en 2015.
Des signaux au rouge
L’Amérique latine est désormais globalement en récession. Au Brésil, 7e économie de la planète et 1re économie de l’Amérique du sud, après une forte reprise de la croissance en 2010 (7,5 %), tous les signaux sont désormais au rouge : la production manufacturière recule, la balance commerciale, structurellement excédentaire depuis 2000, est désormais déficitaire malgré la dépréciation du real par rapport au dollar depuis 2012. La désindustrialisation s’accélère, tendance lourde d’un pays tourné vers l’exportation de matières premières et qui a réduit les mesures protectionnistes. En Argentine, après une croissance très soutenue entre 2003 et 2011 (7,5 % en moyenne), l’arrêt est brutal, et la récession devrait se prolonger en 2015. La production industrielle chute et l’inflation est au plus haut.
Même si la croissance reste très forte, l’économie chinoise ralentit. La croissance au 3e trimestre a été de 7,3 %, le plus mauvais chiffre depuis 5 ans et des incertitudes importantes existent (voir article sur la Chine dans ce dossier). En Inde, la croissance est désormais autour de 5 %, loin également des chiffres (8-10 %) des années 2003-2008. Depuis la fin des années 1980, la baisse tendancielle du taux de profit est marquée, et la croissance devrait continuer à s’affaisser.
Le Japon toujours en dépression
L’économie japonaise est en récession, avec un PIB qui a décru 1,9 % et 0,4 % aux 2e et 3e trimestres. La hausse de la TVA en est en partie responsable, mais la dépression japonaise a des causes bien plus profondes. La dépréciation du yen (baisse du cours du yen par rapport aux autres monnaies), engendrée par le « quantitative easing » (fourniture massive de liquidités au système bancaire – voir article de ce dossier sur la bulle financière), n’a pas soutenu l’activité, car la stimulation des exportations a été dominée par le recul de la demande intérieure dû à l’inflation importée.
C’est la faillite des « Abenomics », vantées par certains économistes keynésiens qui saluaient le volontarisme du Premier ministre Abe (qui, faute d’alternative, vient de remporter les élections japonaises).
Source : NPA